Abbaye carme de Saint-Hilaire, Monument Historique classé des XIIe et XIIIe siècles, premier bâtiment conventuel carme (XIIIe siècle) du Comtat Venaissin (1274-1791) - Ménerbes - Vaucluse - Réfectoire

 

 

  Abbaye Saint-Hilaire

  Le réfectoire et la cuisine

 

  Rejoignez l'Association des Amis de Saint-Hilaire !  - infos -

   Afficher la page plein écran - infos -   Le raccourci CTRL et F - infos -

 

 

  

  Le réfectoire

Abbaye Saint-Hilaire, monument historique classé des XIIe et XIIIe siècles, premier bâtiment conventuel carme (XIIIe siècle) du Comtat Venaissin (1274-1791) - Ménerbes - Vaucluse - Plan du réfectoire

 

 

  

  Préambule

 

Le réfectoire, le lieu où l’on "se refait", est le local où, obligatoirement, tous les frères (à la réserve du sacristain qui garde l’église durant les repas) se rassemblent pour manger.

 

La refonte en juillet 1247 de la Règle de saint Albert Avogadro, patriarche de Jérusalem, par une bulle "paganorum incursus", du pape Innocent IV (v. 1180/1190 † 1254), prescrit aux frères carmes de prendre dans un réfectoire commun la nourriture.

 

Dans le vocabulaire monastique, on appelle "générale", une portion supplémentaire d’œufs, de fromage cuit, de poisson, d’oignons, etc., destiné à un seul moine, servie dans une assiette.

 

Une "pitance" est une portion supplémentaire à partager à deux.

 

Le "mixtum", pris après l’office du matin ou après les vêpres, est composé de pain et de vin (ou de bière): un quart ou une livre de pain, une pinte de vin.

 

La "collation" est un repas léger (un quignon de pain, un verre de vin) que les frères faisaient, les jours de jeûne le soir, après la lecture du Chapitre du soir.

 

 

 

  

  Travaux de restauration

Abbaye Saint-Hilaire, monument historique classé des XIIe et XIIIe siècles, premier bâtiment conventuel carme (XIIIe siècle) du Comtat Venaissin (1274-1791) - Ménerbes - Vaucluse - Réfectoire - 1963

 

Le réfectoire est une longue salle d'environ 12,40 m de profondeur pour une largeur de 4,40 m, voûtée en berceau continu, et pouvant recevoir une soixantaine de convives autour d'une double rangée de tables provenant (de l'ancien hospice de Saint Maurice) de Reims.

 

Description du réfectoire en 1658: ".... reffectoir de la longueur de six canes* (et) troys de largeur nouvellement blanchy pave (et) bien et dubemant accomodé. Joignant ledit reffectoir y a la cuisine a troys canes au carré, avec un four a cuire pain nouvellement faicts".

 

* Dans le Vaucluse, la canne avec le pan et la palme comme subdivisions, est une mesure de longueur qui varie de 1,992 m (Apt) à 1,948 m (Pertuis). La canne d'Aix qui était la référence pour toute la Provence mesurait 1,9887 m.

Abbaye Saint-Hilaire, monument historique classé des XIIe et XIIIe siècles, premier bâtiment conventuel carme (XIIIe siècle) du Comtat Venaissin (1274-1791) - Ménerbes - Vaucluse - Réfectoire

Deux fenêtres situées aux extrémités apportent un peu de lumière à cette pièce. Aucune trace d'ornement n'a été décelée sur les murs préalablement à la réfection de l'enduit en 1996.

 

À noter la surprenante similitude entre cette photographie du réfectoire du Ier siècle du monastère de San Pablo, situé au nord-est du désert égyptien:

similitude de construction

 

 

  

  Le refectorarius

 

Le réfectoire est placé sous la surveillance et la responsabilité du "refectorarius", homme, dit un coutumier, solide, profondément religieux, aimant chacun d’amitié égale, rigide en matière d’ordre, extirpant les abus et qui, malgré sa charge, n’est dispensé d’aucun office, à l’exception, pour des raisons évidentes, de la lecture qui se fait aux repas.

 

Il doit s’occuper non seulement des frères, mais aussi des serviteurs, des hôtes, de ceux qui ont subi la saignée. Il doit veiller à ce que ceux qui doivent subir la punition du pain sec et de l’eau respectent la sentence (qu’en dehors du père abbé, il est seul à connaître).

 

Il assure la distribution des repas aux pauvres. En été, il disposera des attrape-mouches. Il doit fournir les paillassons et les tapis qui recouvrent le sol du réfectoire et ses abords immédiats. Avec des balais de joncs ou de bruyère, il balaie les locaux aussi souvent que la chose s’avère nécessaire. En été il parsème le sol de fleurs, de menthe et de fenouil.

 

Il a aussi la responsabilité du "lavatorium" et des essuie-mains qui y sont suspendus. Il doit toujours mettre du sable et une pierre à aiguiser à la disposition des religieux qui désireraient nettoyer et aiguiser leur couteau. Il est aidé par un frère de semaine, appelé semainier.

 

Pendant le repas, le réfectorier, tel un bon maître d’hôtel, circule entre les tables, pour y vérifier si personne ne manque de rien, ou si la ration de pain de l’un ou l’autre frère n’est pas insuffisante. Auquel cas, il doit pourvoir à réparer ce manquement, en veillant, est-il précisé, à ce que le pain ne soit pas "sale", c’est-à-dire brûlé.

 

Quant aux frères qui, dans un esprit d’humilité et de charité, dit saint Benoît, servaient tour à tour au réfectoire, il leur est recommandé de servir diligemment, encore que sans hâte et sans bruit, de ne jamais rester oisif et de ne pas bavarder avec les aides cuisiniers.

 

Tout l’équipement du réfectoire, à savoir: nappes, serviettes, cuillères (il n’est pas question de couteaux, chaque frère porte le sien à la ceinture, ni de fourchette qui ne fera son apparition, au plus tôt, qu’au XVIe siècle), doit être placé dans une caisse afin de faciliter le service.

 

Le réfectoire est un lieu important. Les frères, même ceux qui étaient animés par la plus exigeante des ascèses, ne l’ont jamais considéré comme un local quelconque, où les tristes nécessités de l’humaine nature les astreignaient à passer, chaque jour, quelque temps.

 

Quoique l’on y mange, les réfectoires monastiques font l’objet d’un traitement architectural remarquable, comme l’attestent ceux de Royaumont, des Bénédictins de Saint-Martin-des-Champs à Paris, et celui des Bernardins.

 

Pourtant, diront certains (et ils n’ont pas manqué au Moyen Âge), "voyez ces moines grassouillets et rubiconds: ne sont-ce pas là de vrais papelards et de francs humeurs de pots qui pintent et s’empiffrent en cachette? Car s’ils s’en tenaient aux exigences de leurs règles, comment seraient-ils aussi gros?"

 

Un très solide et très curieux article de Michel Rouche nous permet d’aborder ces thèmes de réflexion en meilleure connaissance de cause. Il a étudié les rations quotidiennes des frères et des moniales. La ration de pain varie de 1,5 kg à 2 kg (ce qui n’a rien d’exceptionnel à l’époque), la ration de fromage, de 70 à 110 g; celle des légumes secs, de 135 à 230 g; celle du miel, de 0.60 à 1,10g.

 

Celle de graisse (là où celle-ci est autorisée), est de 35 g environ, celle du sel, d’une bonne vingtaine de grammes. La ration de vin (ou de bière) s’élève, en moyenne, à 1,5 l. Transformées en calories, ces rations font, au total, plus de 4.700 calories par jour, avec un maximum (à Saint-Germain-des-Prés) de 6.882 calories. Ceci non compris les apports d’herbes, de racines et de fruits.

 

Si, tenant compte des erreurs de calcul et d’estimation toujours possibles en pareille matière, on réduit d’un tiers la quantité de calories évaluées par M. Rouche, on arrive encore à des rations caloriques impressionnantes (même si elles ne sont pas celles de l’année liturgique; cette étude s’attache aux jours ordinaires).

 

Comment expliquer pareille fringale? La lutte contre le froid, qui sévit pendant toute la mauvaise saison et dans tous les locaux du monastère, le chauffoir excepté, est une première explication.

 

Si elle ne vaut pas pour la bonne saison, il demeure que le frère s’alimente quasi exclusivement de glucides, de farineux et de légumineuses. Le régime est déséquilibré en raison du manque de protéines et de la rareté des vitamines. Ainsi s’explique son type physique, gros, rougeaud et bedonnant.

 

En réalité, c’est un homme bardé de mauvaise graisse, souffrant de carences, digérant longuement, sujet aux flatulences, bien vite privé de ses dents. Il en résultait une forte propension à l’atrabilaire, aux humeurs pessimistes et aux bouffées d’écœurement devant ce corps qui se signalait sans cesse à l’attention.

 

Pareilles habitudes accroissaient l’obsession de la nourriture, l’importance du manger, et en contrepartie, la souffrance (et les mérites) que représentaient les mortifications alimentaires. Sortir de tables sans avoir satisfait entièrement sa faim, ne pas manger en dehors des repas, s’abstenir de viande – la chose la plus désirable qui fût – représentaient en effet, pour eux, une rude épreuve, sans doute plus lourdement ressentie que le poids de la chasteté ou le fardeau de l’obéissance.

 

 

 

  

  L’étiquette de la table

 

Les congrégations religieuses sont sans doute à l’origine de nos "manières de table". La chose s’explique aisément: le fait de vivre en étroite et constante communauté exige que tout soit fait pour éviter les frictions. D’autre part, l’accent est mis sur un idéal de stricte observance, qui astreint l’individu à un contrôle permanent de lui-même, pour lui-même, mais aussi pour les autres.

   

Comment le frère doit-il donc se conduire à table? Sur ce sujet, les coutumiers sont à la fois prolixes et précis. Voici ce qu’en dit, par exemple, celui d’Eynsham (XIIIe siècle). Le frère arrivera toujours à temps pour le repas. Saint Benoît a consacré le chapitre XLIII de sa règle à ceux qui arrivent en retard "à l’œuvre de Dieu et à la table": en fait ils manquent à la prière prononcée avant le repas.

 

Le moine doit se laver les mains avant de passer à table. Il ira se placer près de son siège et attendra, dans un silence et un ordre parfaits, l’arrivée de l’abbé qui doit prononcer la prière – le lecteur commence la lecture (chez les Bénédictins, c’est encore aujourd’hui un passage de la règle); le frère ne fait aucun geste, pas même celui de déplacer sa serviette, avant d’avoir entendu le De verbo Dei qui donne le signal du repas.

 

Il n’observe pas ce que mangent ses compagnons; il ne laisse pas errer ses yeux, mais les tiendra baissés sur son assiette; il coupe son pain; il écoute la lecture avec attention (l’habitude d’origine orientale, de faire lire quelque passage de l’Écriture, de la règle, ou d’une vie de saint, est générale); il mange "religiose" et "honeste"; il fait signe discrètement s’il constate (sans regarder dans l’assiette d’autrui!) qu’il manque quelque chose à l’un de ses voisins; il remercie le frère qui le sert d’une inclinaison de la tête; il recueille les miettes avec son couteau ou avec une petite brosse prévue à cet effet.

 

Il évite de tacher la nappe ou de la couper; il ne se mouche pas dans sa serviette, il ne s’en sert pas pour se frotter les dents ou éponger le sang qui coulerait du nez; il retourne son verre vide; il recouvre le verre et ce qui lui reste de pain d’un bout de la nappe, etc.

   

Au signal de l’abbé qui met fin au repas et à la lecture, le frère se lève, se place devant la table, prononce une action de grâce, s’incline et se retire, à moins que la communauté se rende processionnellement à l’église, au son de la cloche en chantant.

   

Tout ce cérémonial, dont il n’est ici donné qu’un résumé, se déroule, évidemment, dans le plus grand silence. Pas de conversation. Couteaux et cuillères doivent être maniés de façon à faire le moindre bruit possible. Certains coutumiers vont jusqu’à préciser que si l’on sert des noix, le frère ne devra pas les croquer avec les dents, mais les ouvrir avec son couteau.

 

D’autres coutumiers observent qu’il ne faut pas manger de pain avant le premier service et qu’il ne convient pas de boire la bouche pleine.

 

Le frère ne peut boire qu’assis, et toujours en tenant sa coupe à deux mains. Il ne peut réclamer si on oublie de le servir, mais il peut attirer l’attention du servant de table ou du cellérier sur ce qui pourrait manquer à son confrère. Question de charité.

 

Les nappes ne sont mises, les jours ordinaires, que sur la moitié de la table, de façon que les assiettes et les verres à vin ne soient pas posés sur elles. Les jours de fête, et l’abbé toute l’année, les frères ont droit à une nappe étalée sur toute la table. Les coutumiers répètent à l’envi qu’il faut changer les nappes aussi fréquemment qu’il sera nécessaire de le faire et les serviettes tous les dimanches, car elles se salissent vite. Il faut en mettre de plus belle les jours de fête.

 

Il en va de même des petites pintes d’étain, de bois ou, pour les grandes circonstances, de verre, à l’usage des religieux, et des grandes pintes, ou coquasses, destinées à la "dispense", mot qui, au XIIe siècle, désigne l’endroit où l’on garde les provisions. Les justes sont nettoyés tous les mois, et à chaque fête, les cuillères tous les jours. Tous les jours également, le réfectoire est balayé, et les tables sont essuyées aussi souvent qu’il est nécessaire de le faire.

 

 

 

  

  La cuisine

Abbaye Saint-Hilaire, monument historique classé des XIIe et XIIIe siècles, premier bâtiment conventuel carme (XIIIe siècle) du Comtat Venaissin (1274-1791) - Ménerbes - Vaucluse - Plan de la cuisine

 

Ordinairement, cette pièce n'est pas ouverte aux visiteurs.

 

Cette pièce d'allure rectangulaire de 5,20 m x 4,40 m, voûtée sur sa travée unique à la provençale, servait d'écurie à un cheval en 1961.

 

Elle sera séparée du réfectoire en 1566, où, selon les termes d'un prix-fait: "....maistre Claude Jourdan (maçon à Ménerbes), fayre une murailhe sive buget a la premiere arcade du raffeytoir vieux a la sime de ladicte crote, et icelle murailhe bien et deuement induirre de mourtier...", dans laquelle subsiste le négatif d'une cheminée engagée.

 

En 2007, Daniel Auteuil y joue une scène du film MR 73, film policier d'Olivier Marchal.

 

Scène du film MR73 tournée dans la cuisine de Saint-Hilaire affiche du film MR73

 

 

Armoiries du Comtat Venaissin Coat of arms of the Carmelite order

 

 

Tourisme en Vaucluse Provence - ADDRT 84 Vaucluse en Provence - ADDRT 84